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La méthanisation agricole: un bon choix ?

La méthanisation agricole est-elle un bon choix industriel, agronomique, écologique pour les Côtes-d’Armor ?

Ce procédé industriel consiste à synthétiser du méthane à partir de déchets agricoles. Les agriculteurs équipés d’un méthaniseur produisent et vendent ce gaz (qu’ils appellent « biométhane ») à des distributeurs de gaz naturel (qui est aussi du méthane) à des prix supérieurs à 5 fois le prix du gaz naturel importé 1. Donc cela alourdit d’autant la facture des consommateurs de gaz.

De plus cette activité est très fortement subventionnée par l’État (plus d’un milliard d’euros « débloqués » par Bercy), et aussi d’autres collectivités.

Or ce type d’usines présente trois sortes de mises en danger de la population dans les Côtes-d’Armor et en particulier à proximité du littoral.

Ainsi les deux projets industriels sur la commune de Plouha, contestés en justice, notamment pour ces différentes mises en danger, en sont de sombres illustrations :

Première mise en danger des tiers : liée à l’exploitation

En cas de réalisation d’un de ces projets, chaque jour, toute l’année, 30 tonnes de déchets agricoles solides seraient acheminées à l’usine par de très gros engins agricoles sur des kilomètres. 90 % de ce tonnage seraient évacués sous forme liquide (le digestat) par des remorques-citernes à lisier.

Soit donc : 4 trajets par jour de semi-remorques sur de petites routes, le plus souvent très étroites, sinueuses et sans visibilité, alors que le trafic y est quasi inexistant.

En divers endroits il y a déjà impossibilité de croiser un poids lourd. Un trafic régulier décuplerait le risque de collisions et la nécessité de manœuvres de marche arrière dangereuses.

2ème mise en danger des tiers : erreurs majeures de conception

Les plans des projets sur la commune de Plouha révèlent de très graves erreurs de conception.

Chaque projet comporte trois énormes cuves de méthane, dont le volume total cumulé atteint 9 000 m3. Or, elles sont prévues au plus près de la route de desserte, ce qui est contraire aux règles de l’art en génie industriel.

En effet, en cas de fuite de ce gaz très dangereux, les risques létaux seraient très élevés :

  • pour les automobilistes par explosions en présence des étincelles des gaz d’échappement (sur les 495 accidents connus en France, les incendies et explosions sont les plus fréquents) ;
  • et pour les piétons, cyclistes, cavaliers venant des centres équestres voisins, par intoxications par des traces d’H2S (gaz à odeur d’œuf pourri : le même gaz mortel que celui émis par les algues vertes).

3ème mise en danger des tiers : pollutions létales

Le digestat sous-produit, qui serait épandu dans les champs, contiendrait fatalement une très forte teneur en azote, lequel se retrouverait en taux très élevés de nitrates dans les nappes phréatiques.

La plupart de ces parcelles se trouvent à Plouha sur le bassin versant de la plage très fréquentée du Palus et de celle de Bréhec. Or celle du Palus est déjà classée par l’État à risque élevé d’algues vertes. Les agronomes, dont l’ancien directeur de l’INRAE, membres du Comité National Scientifique Méthanisation, ont conclu à une quasi-certitude de formations d’algues vertes par forte augmentation du taux de nitrates.

Or l’administration préfectorale n’a pas été éclairée sur ces risques par les porteurs de projets.

La présence de ces trois risques majeurs pour la population locale et les touristes l’été est en contradiction flagrante avec divers articles du code de l’urbanisme, ce qui devrait rendre les permis de construire concernés illégaux. Il serait ainsi logique que ces permis de construire soient retirés.

D’autant que ces risques sont majeurs par leur gravité potentielle ET par leur fréquence en France :

  • gravité  : à l’échelle nationale les accidents de méthaniseurs constatés sont des incendies, explosions, intoxications, graves pollutions des eaux potables par débordements de cuves à digestat ;
  • fréquence : ces accidents ont été multipliés par 2,5 en 3 ans, multipliés par 6 en 7 ans : 495 accidents au 10 janvier 2024, 201 accidents au 3 novembre 2020, soit une augmentation de 246 % en 3 ans 2.

Hélas, la base ARIA / BARPI de l’Etat ne répertorie qu’une petite minorité de ces accidents, pourtant tous très documentés dans les presses locales. L’ampleur de ces chiffres catastrophiques d’accidents de méthaniseurs en France est d’ailleurs le plus souvent méconnue des grands médias nationaux.

Ces statistiques effroyables montrent l’évidence de la mise en danger de la santé publique par ces projets industriels sur la commune touristique de Plouha aux hameaux de Keridouard et de Kerflech,

Cette mise en danger du public est exacerbée en ces lieux par la réunion de ces deux facteurs :

  • la gravité de l’insécurité routière, des erreurs de conception, des pollutions de plages à risques,
  • ces statistiques nationales d’accidents concernant ce procédé industriel pas au point.

A ces éléments s’ajoute l’épuisement progressif du carbone organique des terres. Il est admis le cycle suivant : le carbone, élément indispensable à la vie des végétaux, provient pour l’essentiel des sols cultivés et assez peu du CO2 atmosphérique (via la photosynthèse).

Le carbone (à l’état organique) des déchets végétaux expédiés aux méthaniseurs y est converti en méthane et aussi en CO2, lequel est rejeté à l’atmosphère. Après injection dans le réseau de gaz naturel, ce méthane est converti lors de sa combustion dans les chaudières en CO2 rejeté à l’air lui aussi.

Le digestat résidu (à 90 %) de tout méthaniseur est par nature dépourvu de tout produit carboné. Ce digestat est quand même épandu sur les terres cultivées, donc sans réintroduction de carbone organique dans les sols, qui ainsi s’appauvrissent au fur et à mesure des années (phénomène déjà constaté en Allemagne),

Le bilan est donc le suivant : augmentation du CO2 atmosphérique au détriment du carbone dans les sols, ce qui conduit progressivement à leur stérilisation.

Pour autant, la méthanisation agricole est-elle un moyen de lutte contre le réchauffement climatique ?

Les organismes officiels et l’État considèrent que ce procédé, dont ils assurent la promotion, contribue à lutter contre le réchauffement climatique. Or :

  • Lors de la production d’un méthaniseur : les sources officielles (ADEME, INERIS, INRS, ATEE, etc.) ou scientifiques précisent que chaque méthaniseur produit … non pas du méthane pur, mais en fait un mélange gazeux : méthane + CO2 (à parts à peu près égales). Ainsi, avant même que ce méthane soit brûlé en chaudières, quand un méthaniseur produit 1 m3 de (bio)méthane, il rejette à l’atmosphère 1 m3 de CO2 ! (Après son extraction, avant injection du méthane purifié dans le réseau de gaz naturel)
  • Puis lors de la combustion dans les chaudières : quand on remplace chaque m3 de gaz naturel (= du méthane) par du (bio)méthane (qui est aussi du méthane) injecté dans le réseau, sa combustion en chaudières rejette évidemment la même quantité de CO2 (1 m3) ! (Pour mémoire : 1 m3 de méthane brûlé rejette 1 m3 de CO2.)

En résumé, pour synthétiser et brûler 1 m³ de (bio)méthane,

  • le méthaniseur produit aussi 1 m3 environ de CO2 rejeté à l’atmosphère,
  • en remplaçant 1 m3 méthane (le gaz naturel) par 1 m3 (bio)méthane, sa combustion rejette toujours et encore 1 m3 de CO2.

Il y a donc rejet de 2 m3 de CO2 via la méthanisation, au lieu d’1 m3 de CO2 à partir du gaz naturel.

En outre, le  GIEC considère que tout méthaniseur produit 5 % de fuites de biométhane (gaz à effet de serre 28 fois plus élevé que le CO2), soit par calcul : + 1,5 m3 de CO2 équivalent à ajouter aux 2 m3 CO2. (Il faudrait comptabiliser aussi les rejets de CO2 des transports de pondéreux depuis des km, etc.).

Dernier point : selon les lobbies pro-méthanisation ‘‘le biométhane serait renouvelable » :  qu’en est-il ?

Comme l’expliquent les experts climatologues et agronomes : la quasi-totalité des rejets de CO2 d’un méthaniseur reste très longtemps dans l’atmosphère. Une part est dissoute dans les océans. Seuls 10 % au mieux sont réabsorbés par les plantes à méthaniser : via le processus de photosynthèse, dont la cinétique est très lente en comparaison des rejets massifs en continus de CO2 via la méthanisation.

Conclusion : contrairement aux assertions erronées ou mensongères de certains lobbies, les scientifiques (CNSM, GREFFE, etc.) affirment, comme suite à ce qui précède :

La méthanisation agricole contribue au réchauffement climatique au lieu de le réduire !


  1. Source : Mme Pompili, quand elle était ministre de la transition écologique. ↩︎
  2. Source : le Comité National Scientifique Méthanisation (CNSM) (30 scientifiques dont des  académiciens des sciences, des directeurs de recherche, etc.).  Voir : https://www.cnvmch.fr/accidents ↩︎